Il y a erreur sur le fondement juridique.
Tout d'abord, klr, tu ne cites pas le texte en entier, qui est pourtant très instructeur. Je me refuse à penser que cette dissimulation d'informations est le fruit d'une manoeuvre fraduleuse. Rappelons donc l'article 434-25 du Code pénal, :
Le fait de chercher à jeter le discrédit, publiquement par actes, paroles, écrits ou images de toute nature, sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.
Les dispositions de l'alinéa précédent ne s'appliquent pas aux commentaires techniques ni aux actes, paroles, écrits ou images de toute nature tendant à la réformation, la cassation ou la révision d'une décision.
Lorsque l'infraction est commise par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables.
L'action publique se prescrit par trois mois révolus, à compter du jour où l'infraction définie au présent article a été commise, si dans cet intervalle il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite.
Dors-et-déjà, l'alinéa 2 autorise la critique technique des décisions de justice. Ce qui signifie que les commentaires d'arrêt, même très critiques, ne sont pas constitutifs d'infractions pénales. En effet, ce n'est pas la critique juridique qui est incriminée, mais bien le fait de "
chercher à jeter le discrédit, publiquement, [...] à un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance"
.
Par ailleurs, tu noteras bien sur que nous somme sur ce forum dans le domaine de la presse, avec des dispositions très particulières, quant à la procédure, ou la prescription par 3 mois, très protectrice de la liberté d'expression, qui est le principe dans une société démocratique. Il n'est d'ailleurs pas nécessaire de vous citer à nouveau l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, ce qui serait une injure pour tout "
bon juriste"
.
Mais quel est finalement ce fait matériel qui est incriminée et si sévèrement puni ? Les conditions sont cumulatives : chercher à jeter le discrédit ET porter atteinte à l'autorité de la Justice ou à son indépendance. C'est-à-dire, prendre à partie les juges qui ont rendu la décision.
Ainsi, dans un arrêt du 11 mars 1997, un directeur de publication qui avait publié des propos mettant en cause directement un juge d'instruction, et les magistrats de la chambre d'accusation, les qualifiant de "
boeufs-tigres, bêtes comme des boeufs, féroces comme des tigres"
. La Cour de cassation considère que ces propos sont pénalement répréhensibles sur le fondement de cet article, en raison du caractère outrancier du propos, remettant en cause l'impartialité des juges, et voulant atteindre dans son autorité, par-delà les magistrats concernés, la justice, institution fondamentale de l'Etat. Mais si ces propos ont été sanctionnés, ce n'a pas été le cas de la phrase juste au-dessus : "
C'est en ce sens qu'une telle décision constitue outrageusement un véritable déni de justice"
, qui s'attaque, comme vous pouvez le lire, à la décision elle-même, et non aux juges ni à l'institution qui l'a rendue, et qui, même aberrante, relève tout de même du commentaire technique personnel et qui est parfaitement autorisé, et même protégé par les textes les plus sacrés de notre corpus juridique.
Voilà ce que c'est. Ce n'a pas été le cas ici, nous n'avons même pas pu aborder le commentaire technique de la décision. Et je ne pense pas qu'il serait venu à l'idée d'un seul des intervenants de mettre en cause l'autorité et l'indépendance de la justice : c'est une allégation manifestement aberrante.
Si je n'avais pas un TD à faire, je m'intéresserai également à l'accusation calomnieuse en des termes abstraits, mais là, je vais surtout prendre un carambar.