Les journaux s'en sont largement fait l'écho, le Président de la République s'en est ému : Jorge MONTES, prévenu de multiples chefs criminels, s'est vu remettre en liberté alors qu'il était en détention provisoire, suite à une "
erreur de plume"
du dispositif de l'ordonnance de la chambre de l'instruction.

La Cour, saisie de l'appel d'une ordonnance du juge de la détention et des libertés refusant cette mise en liberté, avait infirmé cette première décision au lieu de la confirmer.

Logiquement, l'intéressé avait été remis en liberté : scandale politico-médiatico-judiciaire...on est habitué à ce genre de tonitruantes réactions qui n'apportent strictement rien à l'analyse juridique de la situation et à la sérénité de la Justice.

En effet, il apparaissait que la Cour avait adopté des motifs tels que, très légitimement, elle aurait voulu confirmer la première décision et, donc, maintenir l'intéressé en détention

La question centrale est donc : est-on en présence d'une erreur purement matérielle en contradiction avec la volonté des magistrats l'ayant rendue au regard des motifs par eux adoptés ?

Si tel est le cas, le Parquet général est fondé à présenter une requête en rectification d'erreur matérielle sur le fondement des articles 710 et suivants du code de procédure pénale.

Article 710 CPP : "
Tous incidents contentieux relatifs à l'exécution sont portés devant le tribunal ou la cour qui a prononcé la sentence ;
cette juridiction peut également procéder à la rectification des erreurs purement matérielles contenues dans ses décisions. Elle statue sur les demandes de confusion de peines présentées en application de l'article 132-4 du code pénal.
En matière criminelle, la chambre de l'instruction connaît des rectifications et des incidents d'exécution auxquels peuvent donner lieu les arrêts de la cour d'assises.
Sont également compétents pour connaître des demandes prévues par le présent article, selon les distinctions prévues par les deux alinéas précédents, soit le tribunal ou la cour, soit la chambre de l'instruction dans le ressort duquel le condamné est détenu. Le ministère public de la juridiction destinataire d'une demande de confusion déposée par une personne détenue peut adresser cette requête à la juridiction du lieu de détention."


Mais le cas n'est pas banal car il y va de la liberté d'un prévenu !

Je viens donc de faire une courte recherche de jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation et j'y mis la main (de Justice bien sûr) sur un arrêt rendu le 18 janvier 1994 dans une affaire similaire

[url:1km2hy2v]Http:
//www.
legifrance.
gouv.
fr/affichJuriJudi.
do;
jsessionid=14A2D07E1E230AA50B9B7BDA9ECB685A.
tpdjo12v_3?idTexte=JURITEXT000007066068&
fastReqId=1262542360&
fastPos=42&
oldAction=rechExpJuriJudi[/url:1km2hy2v]

La réponse de la Cour de cassation apparaît claire s'agissant de la préservation des libertés individuelles : (je cite le résumé de l'arrêt)
"
Si les chambres d'accusation ont la faculté, en application des dispositions de l'article 710 du Code de procédure pénale, de procéder à la rectification des erreurs purement matérielles contenues dans leurs décisions, elles ne peuvent, sans porter atteinte à la chose jugée, restreindre ou accroître les droits consacrés par la décision, objet de la rectification. Lorsque le dispositif d'un arrêt, notifié conformément à l'article 217 du Code de procédure pénale, infirme une ordonnance de prolongation de détention, il confère un droit à la liberté;
les juges ne peuvent dès lors, en se fondant sur les motifs qui le précèdent, dire que ce dispositif aurait dû confirmer ladite ordonnance et prescrire sa rectification en ce sens.
"


Il y a donc fort à parier que, dans l'affaire Jorge MONTES, la Chambre criminelle adopte la même position : d'aucuns pousseront encore des hauts cris !

Je n'ai pas trouvé - mais ce n'est pas un critère - de jurisprudence "
inverse"
c'est-à-dire concernant un prévenu maintenu en détention suite à une erreur matérielle alors que les juges avaient adoptés des motifs tendant à sa libération.

Si vous en connaissez, brillants étudiant(e)s que vous êtes, il serait intéressant de nous en faire profiter, non ?